
Tremblement de terre en Turquie : Destin ou Corruption ?
Introduction
Le séisme dévastateur qui a frappé la Turquie en 2023 a révélé des failles bien plus profondes que les simples fissures dans les murs. Au-delà des bilans humains tragiques, cette catastrophe a mis en lumière deux problèmes majeurs : l’instrumentalisation du destin (“kader”) par les autorités pour éviter toute responsabilité, et le détournement massif des fonds publics destinés à la prévention.
Le théologien İhsan Eliaçık, lors d’une intervention percutante sur la chaîne TELE 1, a déconstruit ces mécanismes avec une rare clarté. Son analyse, à la fois théologique et politique, offre une perspective essentielle sur les responsabilités humaines derrière les catastrophes dites “naturelles”.
1. Le “Destin”, un argument politique et théologique contesté
Face à la tragédie, le président Recep Tayyip Erdoğan et d’autres responsables ont invoqué le destin, présentant le séisme comme une fatalité divine. Une posture que Eliaçık rejette avec force, en s’appuyant sur une lecture rigoureuse du Coran.
Une interprétation coranique opposée au fatalisme
Eliaçık cite notamment le verset :
“Ce qui vous atteint comme malheur est dû à ce que vos mains ont acquis.” (Coran, 42:30)
Pour lui, les catastrophes ne sont pas une punition divine aveugle, mais souvent la conséquence d’actions humaines : corruption, négligence dans la construction, mauvaise gestion des fonds publics.
Un outil de manipulation politique ?
En qualifiant les victimes de “martyrs” et en invoquant la volonté divine, les autorités évitent les questions gênantes. Cette rhétorique, selon Eliaçık, sert à :
- Étouffer les critiques sur les défaillances structurelles.
- Détourner l’attention des responsabilités politiques.
- Encourager la passivité des citoyens au lieu de les pousser à exiger des comptes.
2. Le scandale des fonds publics détournés : la taxe séisme en question
L’autre pilier de son intervention concerne l’utilisation opaque des fonds collectés via la “taxe séisme”, instaurée après le tremblement de terre de 1999.
800 milliards de livres turques… pour quoi faire ?
Malgré cette manne financière, les bâtiments se sont effondrés comme des châteaux de cartes, et les secours ont été notoirement insuffisants. Pire : l’AFAD (Agence de gestion des catastrophes) a dû lancer des appels aux dons dès les premiers jours, révélant un grave dysfonctionnement.
Une trahison envers les citoyens
Eliaçık dénonce :
- L’absence de transparence sur l’utilisation des fonds.
- La corruption dans les chantiers de construction.
- L’impunité des responsables politiques et des promoteurs véreux.
3. Un appel à la justice et à l’action collective
Eliaçık ne se contente pas de critiquer : il exige des mesures concrètes.
- Poursuites judiciaires contre les responsables (maires, promoteurs, fonctionnaires corrompus).
- Transparence totale sur l’utilisation des fonds publics.
- Mobilisation citoyenne pour empêcher de futures tragédies.
Son message est clair : accepter le “Destin“, c’est renoncer à la justice.
Conclusion : La catastrophe n’est pas qu’une question de tectonique
Le séisme turc de 2023 n’était pas seulement un phénomène géologique. C’était aussi le résultat de décennies de corruption, de négligence et de manipulation politique.
Eliaçık nous rappelle que les catastrophes ne sont jamais 100% “naturelles” – elles sont aggravées par l’incompétence et la malhonnêteté. Refuser ce constat, c’est condamner des milliers d’autres vies à l’avenir.
Sa voix rejoint celles de nombreux Turcs qui réclament désormais justice, transparence et responsabilité. Parce qu’un pays qui enterre ses morts ne doit pas enterrer la vérité avec eux.
💡 Pour aller plus loin :
- L’enquête sur la taxe séisme en Turquie.
- Les comparaisons avec d’autres catastrophes (Haïti, Fukushima).
📌 Question à méditer : Jusqu’à quel point une catastrophe est-elle vraiment “naturelle” ?